nous souhaitions vous informer
nous souhaitions vous informer qu’une décision a été prise
la monnaie « santé » vaudra à présent 58% de la monnaie « shampoing »
et a chuté hier à nouveau de 18 points par rapport à la monnaie « finance »
ceci est une invitation officielle à la chasse aux sous perdus
nous souhaitions vous aviser qu’il vous en reste plus qu’à d’autres
et qu’ils pourraient vous les prendre
et que nous pourrions vous les prendre
veuillez noter qu’il n’existe à ce jour aucune règle officielle reconnue par la fédération sportive
si ce n’est l’obligation de participer
nous vous remercions de votre achat
il a été porté à notre attention que les costumes livrés l’ont été avec les poches trouées
nous ne fournissons aucun modèle de remplacement
là où s’écoule l’effort sur le trottoir
nous vous demandons de bien vouloir ne pas laisser de traces
veuillez prendre note du fait que ce jour marque la fin de l’âge de pierre
en ceci que la pierre est sable, en ceci que le sable est coté en bourse
et que tout ce qui n’a pas été construit de vos propres mains sales pourra s’évaporer sans préavis
nous sommes dans le devoir de vous annoncer qu’il n’y a plus d’édifices à bâtir
sinon des autels à la gloire du dieu qui vous sera attribué
que toute tente, cabane, foyer de fortune ou halte non régularisée fera l’objet de poursuites administratives
merci de bien vouloir attendre derrière la ligne avec vos mains serrées
plus d’informations suivront
sur ce que vous pourrez en faire
veuillez suspendre immédiatement et jusqu’à nouvel ordre toute activité associée à la douceur
ne tirez pas de chaise pour un inconnu
à la prochaine mise à jour vous sera notifié le nouvel usage prévu pour l’espace entre vos bras
nous avons le regret de vous informer que l’eau des mers n’est plus navigable
si le ciel s’assombrit, souvenez-vous que la mitraille
est aussi noire que les oiseaux
nous avons la joie de vous apprendre que tout homme dispose d’une liberté totale de mouvement dans une aire d’un pas sur deux
où un pas sur le marbre est plus vaste que l’univers connu
et où un pas dans le désert n’ira pas plus loin que le bout de votre chaussure
tous les hommes et les femmes naissent et demeurent égaux en nombre de pas
nous vous invitons à tourner sur vous-mêmes ou à respecter l’itinéraire désigné
car le diamant a besoin de marcheurs des profondeurs
comme l’eau a besoin de collecteurs de pluie
et le ventre insatiable, de marteleurs de terre
si la course est trop longue, arrêtez-vous
si vous vous arrêtez, veuillez justifier votre choix au moyen du formulaire ci-joint et nous le renvoyer sous pli scellé d’ici sept heures ouvrables
faute de quoi nous serons dans l’obligation de vous assigner un nouveau rêve
nous sommes malheureusement dans l’impossibilité de vous répondre actuellement
nous vous demandons de bien vouloir patienter
entre le barbelé et l’espoir
nous vous remercions de votre appel à la lune
nous accusons réception de votre cri
nous avons l’honneur de vous accueillir parmi les dépossédés
Avenue Ouest
Mon pays, c’est le pétrole
Dont j’arpente le plancher
Ma ville, c’est le royaume
Des couloirs de carton
Des allées de plastique
Où sous un soleil de néon
Gisent des végétaux sous vide
Quel vide
Une opportune absence d’air
Il parait qu’on s’y conserve plus longtemps
Cans de conserve
Jusqu’à expiration
Expire, plus que n’inspire
Dans le doute
Que l’air soit délétère
Photosynthèse à l’envers
Ma jungle quadrilatère
A pourtant gardé ses repères
D’avant, et elle
Se souvient encore de l’Ouest
Ce songe immémorial de prospérité
Son Nord perdu, échappé à la misère
Son Sud aux accents chauds et son Est,
À jamais renié.
Qui marche encore vers là
Où tout a commencé ?
Ouest, où la journée finit
Ouest, où la richesse éclot
Au sein de l’Ouest
Je me suis nourrie
Terre-mère de bitume
Dans le sable, je marche mal
Recouvre, recouvre
Et que glissent les roues des caddies
Et que règnent les roues des voitures
Je sais bien où aller
Un peu moins d’où je viens
Mais je mange à ma faim
Avance, avance
Tu as jusqu’à la date indiquée sur ta peau de pellicule moulante
Humanité sous vide
Je ne me plains pas
J’ai appris à marcher à plat
La tête dans le sac
Je me suis dégagé un petit espace pour hurler
Les jours de pleine lune
Je rêve de Sud le temps d’un hiver
Et de forêt l’espace d’un weekend
Si tu voulais vraiment partir, tu l’aurais déjà fait
Le supermarché reste ouvert assez tard
Et on y afflue par millions
J’ai vu le blé en boite et en épi
J’ai vu la terre en sac et sous mes pieds
J’ai vu les oiseaux trouver
La cime d’arbre qu’on leur a laissée
Il nous reste encore juste assez de nostalgie
Pour ne pas tout oublier
Dans ta ruée vers l’Ouest
Rien ne t’empêche parfois de t’arrêter
L’Ouest a deux seins
Celui qui te nourrit
Et celui qui te consume
Tu ne peux pas choisir
Les deux te sont donnés en même temps
Je suis faite à 50% d’eau, et à 50% de plastique
Comme d’autres sont faits de terreur et d’étoiles
Et d’aucuns, de silence et d’ennui
J’ai l’Ouest gravé sur la peau
Marquée au fer blanc
Entends-tu les cloches de ton troupeau ?
Entends-tu les cloches de ton couvent ?
Ton fast fashion en guise d’oripeaux
Ta culpabilité pour relatif fardeau
On se bâtit d’erreurs, on se bâtit de sang
Bêtes plastifiées des villes d’Occident
Taking the shawl
or If you don’t leave, you can’t come back
Taking the shawl
I can only see my home
From afar
Le voyage est élastique
Dit le nomade
Au gadjo statique
Plus on s’éloigne, plus on revient
Ne tire pas
Inutilement
Your hands are still sore from the rope
Mine feel the outlines
I just crossed
J’ai perdu ma langue
J’ai perdu toutes les langues
Et écouté
Le calme suit la certitude
D’être terrifié
Marche sans crainte
Le foyer est autant la maison
Que le feu
Qui guide ton retour
Deeper the night, brighter the smoke
From the campfire
Where your people sing
— About the poet, Marianne Lorthiois
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